Peter Brook passe le flambeau

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©AFP – Peter Brook tourne la page. Après une aventure de plus de 35 ans avec le théâtre parisien des Bouffes du Nord, le metteur en scène britannique Peter Brook passe le flambeau. Pour lui succéder, il a choisit d’en confier la direction à «deux Olivier», Olivier Mantei et Olivier Poubelle, avec lesquels il travaillait déjà. L’un, Olivier Mantei, 45 ans, également directeur adjoint de l’Opéra comique, est plus proche du théâtre et de la musique. L’autre, Olivier Poubelle, 50 ans, qui exploite à Paris deux salles dont le Bataclan, vient de la production des musiques actuelles.Les nouveaux directeurs ont des projets, parfois aux frontières de la musique et du théâtre, une orientation souhaitée par Brook. «Cela me semble une évolution tout à fait naturelle et inévitable», ajoute-t-il. «Dans cette transition, comme je voulais absolument être là pour les aider, je sentais que la meilleure chose qui bouclait notre époque et simultanément ouvrait la leur, était un projet que j’avais depuis des années “La flûte enchantée” de Mozart», déclare-t-il.

Une nouvelle direction
A 85 ans, il dit n’éprouver ni fierté ni nostalgie alors qu’il a monté dans ce théâtre -ouvert en 1974- des spectacles jugés à l’époque iconoclastes mais devenus des références comme Timon d’Athènes (1974) de Shakespeare, Ubu aux Bouffes (1977) d’après Alfred Jarry, La conférence des oiseaux (1979) d’après Farid Al-Din Attar ou Impressions de Pelléas d’après Claude Debussy (1992). «Toute ma vie, la seule chose qui a compté, et c’est pour cela que je travaille dans le théâtre, c’est ce qui vit directement dans le présent», a-t-il déclaré. «Le théâtre, ce n’est pas vivre quelque chose de merveilleux pour soi-même mais c’est vivre ça ensemble et dans le présent, pas dans le passé», explique-t-il.

Mais Peter Brook est inquiet quant à l’avenir du théâtre, le ministère de la Culture ayant manifesté sa volonté de réduire de manière drastique ses subventions. «Financièrement, c’est clair que la responsabilité est de plus en plus lourde. Les Olivier ont beaucoup de mal déjà maintenant à avoir les fonds nécessaires.» «Nous n’aurions jamais pu faire la moindre chose depuis la création des Bouffes si on n’avait pas eu l’aide des subventions», explique-t-il, «à moins de monter le prix des billets à un niveau impensable parce que ça casserait tout le côté populaire» du lieu.

Un lieu mythique
Les Bouffes du Nord, ouvertes en 1974 par Peter Brook et Micheline Rozan, fonctionnent comme un théâtre subventionné bien qu’il appartienne à une personne privée à laquelle un loyer est versé. Se voulant un théâtre de proximité, il pratique des tarifs allant de 18 à 35 euros. Peter Brook y a créé le Centre international de Créations théâtrales (CICT) et continuera d’animer la recherche dans ce lieu devenu mythique, largement ouvert sur le monde et conçu comme terre d’accueil des cultures étrangères. «Il n’avait pas envie que ce théâtre devienne un musée», affirme Olivier Mantei. «Peter Brook connaissait notre attachement au lieu et notre capacité à entretenir l’idée qu’il s’en fait», poursuit-il. «Il faut qu’il reste un lieu de recherche, d’expérimentation et de vie».

Le théâtre, qui peut accueillir seulement 500 spectateurs, n’autorise pas «des projets industriels» et privilégiera une exploitation longue, avec des tournées. La saison 2010-2011 verra 271 levers de rideaux aux Bouffes du Nord et cinq productions nouvelles y seront présentées.

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